Selon Ellul, la technique devenue facteur déterminant de l'ensemble des phénomènes de société a des effets autrement plus sérieux sur l'« être humain ». Ce que le chrétien trouve dans son rapport à Dieu, Karl Marx le trouvera plus tard dans le rôle de la société. Quoiqu’il soit commun de définir en termes génériques comme hommes, ce terme peut provoquer une certaine confusion dans la mesure où il désigne aussi le sexe masculin. Franz-Emmanuel Schürch écrit « que la finitude donne justement à l’homme sa puissance, comment c’est elle qui le rend capable, comment en un sens c’est elle qui ouvre des possibilités plutôt qu’elle n’en ferme »[70] et encore plus paradoxal ce qui devait limiter la connaissance, en fait la rendre possible[71]. Figure de proue du courant de pensée existentialiste, Jean-Paul Sartre a fourni un effort considérable en vue de définir précisément son concept fondateur. Constamment le Dasein se rapporte à lui-même, à sa possibilité d'être lui-même en propre. On entend par être humain l’homme, soit l’animal appartenant à la famille des homos sapiens. Pour lui, la question de l’humanisme est viciée dans son principe même par la définition implicite de l’humain qu’elle présuppose écrit Yannis Constantinidès[22]. Ce concept traverse loeuvre de Nietzsche, mais apparaît de manière éclatante dans Ainsi Parlait Zarathoustra. De plus, considérée sous le rapport de la fragilité de notre condition, éphémère et changeante, à notre opacité, la finitude s'oppose à l'immuable ainsi qu'à la transparence. « L'homme ne déploie son essence qu'en tant qu'il est revendiqué par l'Être » écrit Heidegger dans sa Lettre sur l'humanisme[80]. Que de crimes, que de guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eût point épargnés au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant le fossé, eût crié à ses semblables : Gardez-vous d'écouter cet imposteur; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à personne." L'homme pris en lui-même (en son genre), n'est qu'un étant parmi les autres : ce qui l'institue comme « être-humain » (comme Dasein), est le saisissement, à chaque instant, de son être par la possibilité de sa propre mort, saisissement qui l'arrache à sa condition animale pour en faire un étranger à l'ensemble de l'étant, écrit Jean-François Marquet[79]. Ainsi, note Louis Liard[8], l'idée que tous les hommes soient égaux par nature est apparue chez les penseurs de la Grèce ancienne. Il se différencie des autres espèces par son mode de déplacement bipède, son langage articulé, ses mains préhensiles et son intelligence développée . e concept de développement est polysémique, il évoque plusieurs dimensions à la fois théoriques et même idéologiques. Si « tout Souci est Souci de l'Être », c'est par le Souci que l'expression, mainte fois répétée, « Il y va de son être » prend sens et que l'on doit comprendre concrètement comme souci de se perdre, dans l'anonymat de l'opinion générale, dans le « On ». La Lettre sur l'humanisme, donne l'occasion à Martin Heidegger de s'interroger dans le droit fil de la tradition allemande[N 13] sur ce qu'il en est de la dignité propre de l'être humain, Quelles que soient les variétés de l'humanisme, celui de la Renaissance, de Marx ou de Sartre, « l'humanité de l'homo humanus est déterminée à partir d'une même interprétation de la nature, de l'histoire, du monde, du fondement du monde, c'est-à-dire de l'étant dans sa totalité »[72]. Rendre au mot humanisme son sens, qui fait l'objet de son ouvrage la Lettre sur l'humanisme, c'est comprendre que l'être humain ne se pose plus à partir de son animalitas, mais s'ouvre avec le « langage » à ce qui est son affaire propre : à savoir l'advenue de l'être lui-même ; die Geschichtre des Seins[24]. Comme le constate Hans Ruin, ce discours cartésien sur la liberté se veut aussi une définition de l’essence de l’homme et un appel à la réalisation de cette essence par le jeu du « libre-arbitre »[19]. En nous invitant à ainsi repenser radicalement l'être de l'homme, Dominique Janicaud considère que l'ère de l'humanité de l'homo humanus s'achève[78]. Interroger l'existence au lieu de l'essence c'est privilégier les questions qui s'attachent « au fait d'être », que l'on soit ceci et non pas cela, autrement dit apporter une réponse à la question du « Qui » de préférence à la question du « Quoi ». Il n'y a pas d'entente de l'être possible sans cette résonance. En grec il ne s'agit nullement d'« animal » mais de « vivant », c'est-à-dire d'étants dont l'être éclot à partir d'eux mêmes si bien que cela inclut tout aussi bien les dieux-, . Or ce n'est pas dans sa spécificité générique ni dans son intellect ou dans sa prétendue ressemblance divine que l'« être humain » puise son caractère insigne et sa dignité, mais dans le rôle qui lui est dévolu dans le déploiement de la vérité de l'« Être ». Dans son livre, «Discours de la méthode» où il expose sa philosophie, Descartes prône que l’être humain est en fait une substance qui pense et raisonne uniquement. L’être humain est le niveau le plus haut de complexité atteint par l’échelle évolutive. Tout ce qui, livré d'heure par heure à l'homme par les moyens d'information dont il dispose aujourd'hui, le surprend, l'excite et fait courir son imagination [...].» Comme cette lumière artificielle qui nous coupe de l'univers en masquant le ciel étoilé, le flot d'images artificielles du monde, avec lesquels nos appareils nous submergent, déracine l'humanité. Ce à quoi le Dasein est toutefois de prime abord ouvert, ce n'est pas la réalité sensible, mais la signification qu'elle revêt pour lui[63]. Après l’âge de trois ans, le symbolisme prévaut sur la pensée humaine. De ce que les hommes se sentent différents des autres étants mais semblables entre eux « a conduit à déplacer le débat vers celui de la « condition humaine » plutôt que vers la question du genre ». Cette auto-interprétation signifie pour l'être humain expliciter tout mouvement de la vie en liaison avec le sens général qu'il donne à sa propre existence. Il ne s'agit plus de mettre l’accent sur la valeur de l’homme plutôt que sur celle de Dieu (ou de la Nature), mais de parer les menaces sur la personne humaine qui viennent de l’organisation économique et sociale ou des développements techniques. Après l’âge de trois ans, le symbolisme prévaut sur la pensée humaine. Dans cette perspective la question de la dignité de l'homme que la pensée humaniste engageait au tournant de la Renaissance ne faisait que reprendre en le renforçant un vieil idéal de perfection humaine que l'Antiquité avait déjà connu. À partir de Descartes on commence à distinguer deux grands courants dans l'approche de l'« être humain », le courant cartésien qui s'inscrit dans la tradition de l'homme rationnel et un courant existentiel attaché au conditions historiques et personnelles du vécu, dont l'origine peut être trouvée chez Saint Augustin et Luther. Platon distingue en lui trois parties ou plutôt trois puissances différentes : le désir, le cœur et la raison. La parole va être considérée comme l'« élément », le propre de l'« habiter » de l'homme, et le langage sa « maison ». Gunther Anders remarque que les traditionnels conflits entre devoir et passions animés de forces à peu près équilibrées se situaient au tréfonds de la conscience individuelle, avec « l’autonomisation progressive de la technique (son éloignement dans un système technicien hors d’atteinte pour notre sensibilité), « l’homme qui s’angoisse reste loin derrière l’homme qui produit ». L'animal « a » l'être, mais n'est pas « à être », parce qu'il est toujours, déjà, parfait en lui-même. Déjà, en leur temps, au XIXe siècle, comme le signale Françoise Dastur pour Paul Yorck von WartenburgPaul Yorck von Wartenburg, philosophe allemand et Dilthey, les hommes avaient perdu ce caractère vivant, cette Lebendigkeit , cette capacité de vivre par eux-mêmes, ils étaient devenus des hommes sans histoire (geschichtlos) dans la mesure où leur vie se trouvaient être dominée par le « mécanisme », car « le propre du « mécanisme », qui accompagne la technique c'est d'expliquer toute vie, y compris la vie psychique, en partant d'éléments isolés et non pas de la cohésion du sens du vécu »[45]. Par rapport aux autres choses et êtres finis, la conscience que nous avons de notre finitude et de notre condition précaire, en constitue un aspect essentiel, tant par la perception de notre inéluctable dégradation physique que par la valeur que nous donnons à notre existence et à notre être, valeur que résume une notion comme celle de « dignité de la personne humaine » : « L'homme est grand en ce qu'il se connaît misérable », écrivait ainsi Blaise Pascal. L'affirmation de la liberté, comme critère de l'insigne dignité de l'homme, prend la forme de la défense du « libre arbitre » argument dont on repère l'existence chez Augustin et qui fera l'objet d'intenses débats au sein du monde chrétien plus tard avec Martin Luther[14]. Si avec ce double principe on définit l'« humanité de l'homme » et qu'en elle réside son essence, il reste à se demander, à partir de quoi se détermine cette essence spécifique. Par ailleurs, l’être humain est la seule espèce à avoir conscience de sa finitude : autrement dit, l’homme sait qu’à un moment donné il finira par mourir. Cet être en devenir ne lui est pas indifférent, conformément à l'interrogation inquiète de Saint Augustin « Où en suis-je avec moi-même ? Kant, de son côté, met en lieu et place de Dieu, l'homme au centre de la philosophie parce que seule la réalisation de son humanité, de sa dignité, donne sens au monde[20]. Contrairement aux traditionnels réformateurs politiques et moraux, Nietzsche ne souhaite donc guère changer la nature humaine de fond en comble, mais la retrouver sous le masque complaisant de la moralité (§6). Descartes consolide philosophiquement la place centrale de l'homme en en faisant le subjectum, une base ferme et subsistante de toute vérité[5]. la dignité n'est pas seulement une qualité mais un élément constitutif de l'être de l'homme en raison de sa ressemblance avec Dieu[31] (l'Imago Dei du Moyen Âge cf Fra Angelico Dissemblance et Figuration). Dans la définition métaphysique traditionnelle, « l'homme est présenté d'emblée comme un certain être qui, à la différence des autres animaux, serait doué d'une faculté qui lui assure un certain rayonnement, la faculté de raisonner »[2],[N 2]. Heidegger remarquera que pour Kant il n'y a de liberté que dans la soumission à l'impératif catégorique qui culmine dans l’idée d’une moralité rationnelle et universellement fondée, qui par définition vient d'ailleurs[21]. Afin de posséder des propriétés dites personnelles, il est requis que le sujet soit déjà une personne. Hans Ruin, note, après d'autres, que la liberté y est aussi présentée, dès ses premières explorations, comme une invitation pour l’homme à réaliser, à travers elle, la plénitude de son être[19]. D'ailleurs au sortir du Moyen Âge, « l'homme qui se veut une nature envisage de se suffire : c'est en effet une maxime péripatéticienne que la nature ne défaille point en ce qui lui est nécessaire »[17]. Thierry Gontier résume ainsi le renversement opéré par Heidegger : « au projet moral de l'humanisme de la Renaissance, Heidegger substitue une pure eschatologie. Comme première réponse, l'homme biblique ou théologique fait l'objet de nombreuses approches qui toutes font référence à Dieu et à la possible ressemblance de l'homme avec lui. Cette circonstance a changé au fil des années, étant donné qu’au cours des premiers siècles de cette ère, l’espérance de vie humaine n’allait pas plus loin que 25 ans. Martin Heidegger élabore le concept polysémique et fondamental de « Dasein » pour appréhender thématiquement ce que nous sommes nous-mêmes véritablement, à chaque fois, dans toutes les situations de ce qu'il appelle « vie facticielle », ou vie courante de l'être humain. Tous les humanismes tendent à promouvoir l'homme, à souligner sa dignité particulière au milieu de tout ce qui existe. p ar Martin Godon, Cégep du Vieux Montréal.. Pourtant l'idée d'une nature humaine commune à tous les membres de l'espèce commence à se dégager. La variabilité de notre condition a conduit certains à nous penser comme conditionnés, c'est-à-dire jetés dans une existence que nous ne maîtrisons pas. De plus la pensée humaniste qui depuis Platon incarne l'idée, néfaste dans l'esprit d'Heidegger, d'un règne où l'homme devient « le point de mire » de l'être ainsi que de la totalité de l'étant et s'en assure la maîtrise[82], doit être abandonnée. Le dernier Heidegger abandonnant toute définition de l'homme par son essence ou sa position de sujet, inaugure dans sa Lettre sur l'humanisme un humanisme de l'« habiter », que lui-même qualifie « d'étrange sorte d'humanisme ». L'homme dans son unité n'existe plus il n'y a plus que des êtres qui d'un côté agissent et d'autres qui éprouvent des sentiments[37]. Il s'agit de constater que le nouvel ordre du monde accroît le tragique de notre situation en raison des conséquences possibles d'un petit acte irréfléchi, de l'existence de conflits entre des responsabilités contradictoires et de l'aveuglement criminel des nouveaux fanatismes[36]. La catégorie de l’« humain » ne servirait plus qu’à désigner de façon approximative un ensemble de phénomènes (d’organisation, de conduite, d’adaptation, de résistance) dont la stabilité n’est que transitoire[42]. Le recours au néologisme d'eksistence en lieu et place du classique existence vise à libérer définitivement l'être humain de la subjectivité que l'on sent encore dans l'interprétation sartienne d'une existence qui précéderait l'essence[83]. Cette certitude de Soi qui ne tolère de normatif ou d'obligatoire que ce qu'elle fixe en toute autonomie et en toute transparence du Soi, voilà ce que l'homme moderne « veut »[N 10]. Cest en effet à partir du Surhomme que se fait lentrée dans la pensée nietzschéenne, tous les autres thèmes (morale, art, religion, ) devant être compris à partir de cette notion. De même que décrire en détail les émotions, surtout négatives, que l’on ressent est un début de (re)prise de contrôle. La part de l'humain dans l'homme ne donnait pas lieu à débat autre que pratique et leur intérêt était plutôt dirigé vers la part divine qu'ils pensaient y découvrir[7]. Où qu'ils aillent, un périodique illustré se trouve sous leur main. « Si en effet le chat est toujours félin ou le chien canin, l'homme et c'est bien là son drame n'est pas toujours humain, il lui arrive même d'être inhumain, voire de se faire complice de l'irruption de l'inhumain »[3]. C'est en ce dernier sens que l'existentialisme et Jean-Paul Sartre usent de ce terme, il en est de même chez Martin Heidegger dans son ouvrage Être et Temps et chez Emmanuel Levinas[52]. Si l'influence de l'école s'avère insuffisante le système technicien comporte des agents d'adaptation permanents (la formation continue, la publicité, la propagande qui tous visent à adapter l'homme à son univers technique, en perpétuelle évolution). Chez Kant, la liberté comme spontanéité devient la définition même de la pensée et de la compréhension de l'homme. De cette variabilité Montaigne tire la conclusion que tout humain « porte en lui la forme entière de l'humaine condition »[30]. Dans ce dernier cas, il est important que l’homme soit capable de maitriser ses sentiments et de les modifier. Il s'agit donc d'une liberté finie, dépendante, qui encadre et contraint, l'espoir humaniste d'une autonomie de la raison maîtresse d'elle-même. « L'homme tient à la fois au monde sensible et au monde intelligible. Est-il possible, à ce propos, de parler de « l’élaboration d’une figure inédite de la subjectivité » »[43]. Le rapport de l'homme à la technique est le plus souvent abordé sous l'angle du rapport de l'homme à la machine, avec comme thèmes principaux et simultanés soit le danger de son exclusion de toutes ses fonctions par une machine plus performante soit la perspective d'une mutation de l'homme lui-même transformé en machine par l'effet d'une sorte de greffe[44]. Par exemple: Une personne qui ressente de la haine envisage de réaliser un assassinat. Est-il possible, à ce propos, de parler de « l’élaboration d’une figure inédite de la subjectivité » », « un type qui porte dès la naissance l'empreinte de la méga-technologie sous toutes ses formes; un type incapable de réagir directement aux objets de la vue ou de l'ouïe, aux formes des choses concrètes, incapable de fonctionner sans anxiété dans aucun domaine sans l'assistance de l'appareillage extra-organique fourni par la déesse-machine », « l’homme n’est pas simplement dans le temps mais a le savoir du temps et de la caducité ; qu’il n’est pas simplement subsistant comme la pierre ou le nuage, mais il a relation avec son être, qu’il est même bouleversé par son propre caractère problématique et cherche à comprendre son existence ; puisqu’il en est ainsi, l’homme ne se sait pas seulement « différent » et « d’une autre espèce » sur l’arrière-fond de l’animalité, mais il a relation avec Au sens étymologique d'origine latine existere ou « exis-tance » possède une signification précise, il signifie « être hors de soi », être auprès des choses. À l'inverse elle fait naître la possibilité d'assurer le fondement d'une nouvelle appréhension éthique du genre humain se substituant aux anciennes croyances. Blaise Pascal déclare dans ses Pensées que sans le « péché originel », « ce mystère inconcevable », nous serions incompréhensibles à nous-mêmes. Livre I, Chap. Si bien que dans une société moderne complexe, massifiée et étroitement structurée, « on ne peut plus considérer que le mal est une petite affaire personnelle et privée, comme si les humiliations et les misères dues à un ordre injuste, échappaient à toute recherche de responsabilité ontique »[36]. l’impérissable qui gouverne la disparition, le lever et le déclin des choses finies ; il a relation avec le monde, avec le processus de l’individuation, avec la vie du monde en tant que manière dont la toute puissance agit. L’être humain croit aussi en l’existence de l’âme ou d’entités semblables qui transcendent l’expérience corporelle. Nous oscillons tous, en permanence, entre amour et haine, euphorie et déprime, enthousiasme et indifférence, sympathie et antipathie, attirance et répulsion, positif et négatif, bon et mauvais, etc. Le désir (ensemble des appétits charnels et sensibles), préside aux fonctions de nutrition et de reproduction, et réside dans la partie inférieure du tronc, au-dessous du diaphragme ; le cœur, comme son nom l'indique, a pour siège la partie supérieure du tronc ; c'est l'instinct noble et généreux, mais incapable de se donner par lui-même une direction ; au-dessus, dans la tête, siège la raison, la raison qui peut connaître la vérité, diriger vers elle le cœur et ses forces actives, et maîtriser par là les passions inférieures.
concept de lêtre humain 2021